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Proposition de loi: création d'un service de psychologie au sein de l'Education nationale, Sénat, 23/10/2007


Rédigé le Jeudi 8 Novembre 2007 à 08:50 | Lu 1281 commentaire(s)



N° 44 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008
Annexe au procès-verbal de la séance du 23 octobre 2007

PROPOSITION DE LOI tendant à créer au sein de l'Éducation nationale un service de la psychologie pour l'éducation et l'orientation des élèves,


PRÉSENTÉE

Par Mmes Annie DAVID, Brigitte GONTHIER-MAURIN, Éliane ASSASSI, Marie-France BEAUFILS, M. Michel BILLOUT, Mme Nicole BORVO COHEN-SEAT, MM. Robert BRET, Jean-Claude DANGLOT, Mmes Michelle DEMESSINE, Évelyne DIDIER, MM. Guy FISCHER, Thierry FOUCAUD, Mme Gélita HOARAU, MM. Robert HUE, Gérard LE CAM, Mme Josiane MATHON-POINAT, MM. Jack RALITE, Ivan RENAR, Mme Odette TERRADE, MM. Bernard VERA, Jean-François VOGUET, François AUTAIN et Pierre BIARNÈS,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi confie à l'école la responsabilité d'amener les élèves à acquérir des savoirs, avec un objectif réaffirmé de 80 % d'entre eux obtenant un baccalauréat, à développer leur autonomie, à construire leur personnalité et à élaborer progressivement leur projet d'orientation.

Mais la démocratisation du système éducatif est en panne : en 2007, malgré une progression intéressante du taux global de réussite, seuls 63,6 % d'une génération ont obtenu un baccalauréat, contre 64 % en 2006, et ce chiffre ne varie qu'à la marge depuis plus d'une décennie.

De plus, à l'exception notable de ceux qui auront obtenu un niveau suffisant pour entrer dans une Classe Préparatoire aux Grandes Ecoles (CPGE) et dont la famille aura les moyens dans ces conditions d'assurer une scolarité longue et coûteuse à leurs enfants, l'essentiel de ces jeunes bacheliers tentera de poursuivre des études à l'université où - toutes les statistiques le montrent depuis de longues années - près de la moitié d'entre eux échouera dès le premier cycle.

Pour une part, cet échec est dû à une difficulté d'adaptation aux exigences du système universitaire en ce qui concerne la capacité de ces jeunes à assumer une autonomie - pour la plupart d'entre eux nouvelle - dans l'organisation de leurs études. Mais nous savons tous ici qu'est trop souvent en cause également l'inadéquation des choix d'orientation faits par ces jeunes relativement à leurs inclinations réelles, à leurs capacités et à leur méconnaissance profonde des réalités des filières professionnelles choisies.

En réalité, le mal vient de loin : dès le collège, trop souvent, l'orientation scolaire dans le système éducatif français est faite négativement, comme conséquence de l'échec scolaire : les plus faibles étant orientés vers les lycées professionnels, une deuxième vague étant orientée à l'issue de la classe de seconde vers les enseignements technologiques. Ce phénomène est générateur de gâchis humains et sociaux insupportables pour l'individu aussi bien que pour la collectivité.

C'est l'ensemble du système qui est, de ce point de vue, à reconsidérer pour le rendre plus juste et plus efficace.

En effet, tous les éducateurs savent combien l'élaboration d'un projet d'avenir chez l'adolescent, loin d'être seulement une simple question d'information sur la réalité des métiers, les formations offertes et leurs débouchés sur l'emploi, est en lien étroit avec le développement de sa personnalité et la construction de son identité.

Une orientation réussie vers une voie de formation professionnalisante ne saurait être que l'aboutissement d'un processus éducatif, mené en concertation au sein des équipes pédagogiques tout au long de la scolarité sur la base de la réussite scolaire.

Nous proposons de refonder l'orientation de chaque jeune dans le cadre d'une école de la réussite scolaire pour tous, cette orientation résultant de l'élaboration progressive, tout au long de la scolarité, d'un projet individuel de vie professionnelle conçu avec l'aide d'un service scolaire de psychologie pour l'éducation et l'orientation, comportant des personnels bien formés et en nombre suffisant pour assumer pleinement cette responsabilité.

En effet, dans le cadre d'un système éducatif qui scolarise de fait près de 90 % des jeunes jusqu'à 18 ans et au delà, une prise en charge de type psychologique est souvent indispensable pour prévenir, repérer et remédier à certaines difficultés que rencontrent de plus en plus d'entre eux, difficultés qui induisent une souffrance psychique, conduisant à l'échec de leur scolarité, parfois dès l'école élémentaire.

Ces difficultés, d'origines diverses, sociale, affective, familiale, culturelle, médicale, peuvent s'exprimer dans le domaine cognitif et comportemental. Les psychologues exerçant leurs activités à l'Éducation nationale, couramment appelés psychologues scolaires dans le premier degré, et conseillers d'orientation-psychologues dans le second degré et l'université, de par leur connaissance du développement psychologique de l'enfant et de l'adolescent, de ses troubles, des processus mis en jeu dans les apprentissages, ont compétence pour répondre à ce besoin de prise en charge adaptée à l'âge et au niveau scolaire des élèves.

Les psychologues scolaires et les conseillers d'orientation-psychologues, par des interventions en relation avec les parents et les enseignants, accueillent les enfants et les jeunes pour les aider à exprimer, analyser et surmonter les causes de leur l'échec ou de leur relation difficile avec l'école. Ils soutiennent l'intégration des enfants handicapés et contribuent également à détecter les cas d'enfants à risques ou maltraités, ils mènent des actions de prévention en partenariat avec d'autres personnels, notamment des médecins, infirmiers, assistantes sociales de l'Éducation Nationale, et avec des structures de soins, tels que des établissements spécialisés, des associations. Ils font pleinement partie de l'équipe éducative.

Pourtant très sollicités pour leurs compétences, dont l'autorité est largement reconnue, les psychologues scolaires manquent à ce jour d'un statut spécifique en rapport avec leur titre et leur profession. En effet, ils sont assimilés à des enseignants, statut qui ne correspond ni à leur fonction, ni à leur qualification dans la mesure où la loi leur fait obligation d'être titulaire d'un des diplômes requis pour faire usage du titre de psychologue (licence + Diplôme d'État de Psychologie Scolaire ou licence et maîtrise + DESS de psychologie ou licence + master de sciences humaines, mention psychologie). C'est à ce titre qu'ils sont soumis à l'obligation de s'inscrire sur les listes professionnelles, comme le dispose la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002. Ainsi, ils possèdent un statut inadéquat, ce qui tend à les disqualifier et conduit à des confusions relatives à leur rôle.

Dans le même temps, les conseillers d'orientation-psychologues se voient contester leurs missions de psychologues, la tendance étant, depuis de nombreuses années, à leur faire jouer pour l'essentiel un rôle de techniciens de l'orientation fondée sur la connaissance des filières de formation répertoriées en fonction des perspectives d'emploi sensées être crédibles à court et moyen termes.

Telles sont les raisons pour lesquelles les auteurs de cette proposition de loi proposent la création, au sein du service public de l'Éducation nationale, d'un service unifié de la psychologie pour l'éducation et l'orientation des élèves et, dans ce cadre, de reconnaître aux psychologues scolaires et aux conseillers d'orientation-psychologues, un statut spécifique adapté à leur qualification et à leurs missions.


PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après le chapitre II du titre Ier du livre IX du code de l'éducation, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre ... - Dispositions propres aux personnels de psychologie et d'orientation

« Art. L.... : Afin de permettre un meilleur suivi des élèves tout au long de leur scolarité et notamment une meilleure liaison école/collège, collège/lycée et, le cas échéant, une orientation vers l'enseignement supérieur répondant au mieux aux aspirations et capacités de chacun, il est créé au sein du service public de l'Éducation nationale une Direction de la psychologie de l'Éducation nationale pour l'éducation et l'orientation des élèves et étudiants couvrant la scolarité des jeunes de la maternelle à l'université. Ce service regroupe les actuels psychologues scolaires du premier degré et les conseillers d'orientation psychologues du second degré. Les spécificités et les compétences de ces personnels sont maintenues par l'organisation de la formation.

« Ce service travaille en collaboration étroite avec les professeurs principaux de chaque classe, coordonnateurs de l'équipe pédagogique de la classe et responsables du suivi pédagogique des élèves, et avec les parents d'élèves, acteurs indispensables de la réussite scolaire de leurs enfants.

« Ce service concourt à l'acquisition par tous les élèves et les étudiants d'une culture commune large et plurielle, ainsi qu'à l'élévation de leur niveau de formation et de qualification, à la mise en oeuvre des conditions de leur réussite scolaire, à leur développement psychologique, à l'élaboration et à la concrétisation de leurs projets d'orientation et à la démocratisation de l'accès aux études pour tous.

« Dans le cadre des programmes et des emplois du temps des classes, les personnels du service proposent aux élèves, dans des conditions adaptées à chaque niveau considéré, une approche du monde professionnel par une découverte des métiers, du milieu professionnel et de l'environnement économique et social pour leur permettre ainsi de disposer des éléments d'information et d'appréciation indispensables à l'élaboration d'un projet d'orientation adéquat.

« Art. L. ... : Le psychologue de l'Éducation nationale fait partie intégrante de l'équipe éducative et remplit des missions à finalité éducatives et psychologiques. Il occupe une position charnière entre les enseignants, les élèves et leurs parents, les autres professionnels des équipes éducatives et les praticiens extérieurs à l'école.

« Le psychologue de l'Éducation nationale bénéficie du statut particulier de psychologue pris conformément à la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, et à la loi n° 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre social, statut qui fera l'objet d'un décret.

« Art. L. ... :Le conseiller d'orientation psychologue, à l'instar du psychologue scolaire, fait partie intégrante de l'équipe éducative. Il effectue des tâches relatives à la prise en charge psychologique des jeunes et crée grâce à sa formation de psychologue, les conditions les plus favorables d'un repérage précoce des difficultés psychologiques de l'élève, susceptibles de retentir sur les apprentissages et donc d'empêcher une orientation positive.

« Le conseiller d'orientation psychologue accompagne et soutient l'élève dans l'élaboration de son projet d'orientation scolaire et professionnelle en concertation étroite avec les familles, les enseignants et l'ensemble de l'équipe éducative.

« Dans cette perspective, le conseiller d'orientation psychologue met à disposition des élèves de 3ème un dossier unique de candidature qui vise à leur présenter le panorama complet des formations disponibles, il organise des entretiens avec les familles. Ses autres activités s'exercent davantage au sein de l'institution scolaire, notamment la concertation avec les équipes éducatives, la participation à des projets spécifiques pour favoriser la réussite scolaire des jeunes, la mise en oeuvre de dispositifs d'observation continue et de suivi pour les enfants ou les adolescents les plus fragiles, la concertation avec les autres personnels (réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficultés (RASED), assistants de service social, infirmiers et partenaires extérieurs...).

« Art. L. ... : Les psychologues sont formés dans le respect de la loi n° 85-772 précitée exigeant une formation fondamentale et appliquée de haut niveau en psychologie (DESS ou DEA + stage).

« Ils sont recrutés dans l'éducation nationale conformément à la loi sur le titre de psychologue, par concours interne et externe.

« Le recrutement est suivi d'une année de stage comprenant une formation théorique et pratique couvrant l'ensemble du système éducatif (1er et 2nd degrés et enseignement supérieur).

« Un pré-recrutement interne et externe peut être organisé pour les titulaires de la licence de psychologie. Il est suivi d'une formation de deux ans débouchant sur le diplôme défini au premier alinéa. Cette formation peut être ramenée à un an pour les titulaires de la maîtrise de psychologie. Des compléments de formation seront organisés pour permettre aux psychologues en exercice qui le souhaitent de passer d'un degré à un autre. »

Article 2

Le chapitre II du titre Ier du livre III du code de l'éducation est complété par une section ainsi rédigée :

« Section ... : L'information sur les métiers

« Art. L. ... - L'heure de vie de classe doit être, en partie, consacrée à une présentation du monde du travail et à la découverte des métiers ».

Article 3

Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'État de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits fixés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Source: Sénat, Travaux parlementaires



Titre de psychologue | Titre de psychothérapeute | Fonction publique, FPH, FPT, PJJ | Conventions collectives | Education nationale | Textes généraux nationaux et européens | Cabinet libéral



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