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Dérives thérapeutiques et dérives sectaires : la santé en danger. Rapport du Sénat. Avril 2013


Rédigé le Dimanche 28 Avril 2013 à 19:34 | Lu 12623 fois | 1 commentaire(s)



Dérives thérapeutiques et dérives sectaires : la santé en danger. Rapport du Sénat. Avril 2013


Président de la commission : M. Alain MILON, sénateur
Rapporteur : M. Jacques MÉZARD, sénateur.

" La commission d'enquête sur l'influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé a été créée à l'initiative du groupe RDSE pour prendre la mesure des risques dus à des comportements sectaires qui font de la santé l'amorce d'une emprise exercée sur les victimes. Elle a tout d'abord constaté que la maladie et la quête du bien-être pouvaient exposer au risque de dérive sectaire. La commission a également observé l'existence de dérives thérapeutiques dues à des pratiques commerciales, proches de la charlatanerie, qui exploitent les peurs et les attentes de la population en matière de santé et de bien-être et qui peuvent insidieusement orienter leurs victimes vers des pratiques thérapeutiques souvent dénuées de fondement scientifique, compromettant ainsi leurs chances de guérison. Elle s'inquiète que ces deux phénomènes - dérive sectaire et dérive thérapeutique - en se combinant, cumulent les dangers liés à une forme d'emprise et les risques dus à l'exploitation mercantile de la crédulité de personnes vulnérables. De manière générale, la commission juge très alarmant le fait que l'image de la médecine classique, altérée - de manière compréhensible - par des scandales récents puisse conduire des personnes atteintes de pathologies lourdes à s'interroger sur les propositions thérapeutiques de leur médecin pour s'en remettre à des pratiques de « soins » sans nécessairement disposer d'une information complète sur les conséquences de leur choix. La commission d'enquête livre son constat et formule 41 propositions après 72 auditions au cours desquelles elle a entendu associations de victimes, professionnels de santé, experts et représentants d'autorités sanitaires ainsi que des principales administrations concernées. Elle a aussi souhaité entendre des représentants d'organismes et d'associations faisant la promotion de pratiques thérapeutiques sur lesquelles son attention a été alertée. "
Source : Sénat

Le rapport est constitué de 2 tomes, l'un le rapport lui-même et le deuxième qui contient les procès-verbaux des auditions.

Rapport fait au nom de la commission d'enquête sur l'influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé - Tome I : rapport.
Auteur(s) : MÉZARD Jacques, Sénat. 
Editeur : Sénat
Date de remise : Avril 2013
318 pages

LIRE LE RAPPORT


Voici quelques extraits :

1° " M. Serge Blisko, président de la Miviludes, a évalué le nombre de ces pratiques étranges à 400, renvoyant au site internet http://www.annuairetherapeutes.com/ édité par la revue Profession thérapeute pour accéder à ce catalogue infini de « soins ». Cet annuaire en ligne recense en effet « 15 000 praticiens oeuvrant dans les médecines alternatives » dont il établit la liste " et où le terme psycho intervient à plusieurs reprises :  PNL, Psycho-Bio-Acupressure, Psycho-Energétique, Psycho-Généalogie, Psychonomie, Psychopratique, Psychothérapie...

2° Le rapport fait aussi témoignage de pratiques douteuses de certains professionnels intervenant dans la santé, notamment certains psychologues (utilisation du qi-gong à l'AP-HP (" Médecines complémentaires à l’AP-HP. Rapport, mai 2012 ") : " Même dans le cadre hospitalier, le témoignage de Mme Ducher indique qu’une psychologue coordinatrice peut recommander à un malade d’étreindre un arbre pour « prendre l’énergie de la Terre » puis recommander le recours extrahospitalier à un ostéopathe promettant une guérison rapide à condition d’arrêter les traitements chimiothérapiques ".

3° Nous sommes heureux que la question que nous avons soulevé auprès des Pages Jaunes et le Ministère de la santé a porté ses fruits à minima, même si cela reste flou : " D’autres encore relèvent de mots clés différents, notamment dans le domaine de la psychothérapie. La question des psychothérapeutes et de la réglementation récente de la profession a d’ailleurs nécessité un arbitrage de la part du site pagesjaunes.fr, dont la rubrique « santé » est l’une des dix rubriques les plus consultées, 4 millions de données pour les entreprises, 20 millions pour les particuliers.
Afin de tirer toutes les conséquences du décret n° 2010-534 du 20 mai 2010 relatif à l’usage du titre de psychothérapeute, les responsables, après consultation des associations et du ministère de la santé pour distinguer les psychothérapeutes autorisés, des autres praticiens ne répondant pas aux critères définis par décret, a décidé de créer deux rubriques distinctes :

- l’une intitulée « psychothérapeutes » et regroupant les praticiens officiels ;
- l’autre intitulée « psychothérapie hors du cadre réglementé ».

Pourtant, comme l’a rappelé M. Emmanuel Thoorens, directeur des opérations en charge du search et des données du groupe Pages jaunes, « pour le grand public, la différence n’est pas toujours facile à comprendre ». C’est un constat partagé par M. Guy Rouquet, président de l’association Psychothérapie Vigilance1, pour qui l’internaute peu averti n’est pas en mesure de saisir les éléments distinctifs entre les deux rubriques : « les usagers sont conduits à rester dans l’équivoque en pensant qu’ils peuvent s’adresser sans risque à un « thérapeute » non qualifié en médecine, en psychologie ou en psychopathologie ".

4° Sur les revues qui se situent à la limite et notamment la revue Psychologies : " Enfin au-delà des contraintes technologiques, il existe des risques liés à une ligne éditoriale qui peut soulever des interrogations. C’est le cas du site psychologies.com, dont l’équipe de rédaction est la même que celle du magazine éponyme, fort de 2,5 millions de lecteurs.

Plusieurs éléments n’ont pas manqué d’inspirer un certain doute à votre rapporteur sur le site Internet psychologies.com :
- une rubrique « Formations et stages en développement personnel » qui propose des liens vers des annonces publicitaires. La dimension publicitaire, affichée très clairement sur la version papier du magazine, s’efface ici au profit d’une présentation pouvant laisser penser qu’il s’agit d’une sélection de formations recommandées aux internautes. La liste des disciplines proposées - ... - comprend des domaines précédemment identifiés comme potentiellement liés à des dérives sectaires. D’ailleurs le président du groupe Psychologie, M. Arnaud de Saint-Simon, a découvert avec surprise la présence de la kinésiologie dans cette liste à la suite d’une question de votre rapporteur, et a fait savoir qu’il l’avait retirée par un courriel en date du 25 février 2013 ;
- cette présentation des formations et stages est accompagnée de conseils pour trouver des financements, notamment publics ;
- la recommandation de formations dont certaines ont été signalées par la Miviludes est, selon le président du site, justifiée par le seul fait qu’une pratique ou un organisme ait « pignon sur rue ». Cette remarque vaut, à titre d’exemple, pour la naturopathie comme pour la Gestalt thérapie ;
- la recommandation, par le site sur le décodage biologique, de lectures orientées parmi lesquelles un ouvrage signalé par votre rapporteur lors de la table ronde du 29 janvier 2013, dont la synthèse proposée par Psychologies constitue « une attaque en règle contre la médecine dite traditionnelle ». La réponse de M. Arnaud de Saint-Simon : « Est-ce interdit ? » fait prendre l’entière mesure de ce que représente Internet comme outil de promotion pour toutes les théories et pratiques qui peuvent s’avérer dangereuses pour la santé, voire être utilisées par des praticiens mal intentionnés. Car aucun message de vigilance sur ce risque n’accompagne ces informations.

Le fichier ROME (récensement opérationnel des métiers et des emplois) publié par le ministère du travail et de l’emploi, récense des métiers OUF !!! :  " Le ROME comporte des références à des « métiers » relevant de la pratique de thérapies non avérées : non seulement « maître praticien de reiki », mais aussi « conseiller en naturopathie », « intervenant en bioénergie », « intervenant en iridologie » …
Or d’après Pôle emploi, « la création de la fiche K1103 dans la version actuelle du ROME, déployée en décembre 2009, répondait au besoin suivant :
- le domaine du développement personnel a rencontré une progression notable depuis les années 1990,
- les conseillers étaient confrontés à des difficultés lors de l’inscription de demandeurs d’emploi issus de formations en naturopathie, sophrologie, kinésiologie, etc. Par défaut, ces demandeurs d’emploi étaient inscrits comme psychologues. 
Comme le notait le directeur général de Pôle emploi dans un courrier en date du 10 juillet 2012 en réponse à une alerte du directeur général de la santé du 22 février 2012 sur les risques encourus par les métiers présentés dans cette fiche, « ces activités ne relèvent pas d’un exercice illégal de la médecine ». Le renvoi de la responsabilité est de mise, puisque la lettre se termine de la façon suivante : « Sur le site du ministère de la santé, il est indiqué, à propos des pratiques de soins non conventionnelles, que des fiches pratiques seront mises en ligne à partir du second semestre 2012. Avez-vous des informations à nous communiquer à ce sujet ? S’il apparaît que certains métiers de la fiche ROME K1103 sont illégaux et ne doivent en aucun cas faire l’objet d’une inscription de demandeur d’emploi ou d’un dépôt d’offre d’emploi, je vous saurais gré de bien vouloir m’en informer ».
D’après toutes les informations transmises à votre commission, Pôle emploi s’en tient donc à la stricte application du caractère légal de ces métiers plutôt que d’envisager la sensibilisation de ses conseillers aux risques qu’ils comportent. Les mises en garde de la Miviludes et plus encore de la DGEFP, pourtant administration de tutelle1 de Pôle emploi, sur les risques sectaires liées à certains praticiens de ces techniques sont donc passées sous silence au profit du seul critère du caractère légal des métiers. "

Sur l'évolution du titre de psychothérapeute : " Contrairement au souhait des inspirateurs de l’article 52 de la loi de 2004, le titre de psychothérapeute n’est pas réservé aux personnes titulaires d’un titre réglementé par la loi comme celui de médecin ou de psychologue, puisqu’il compte les psychanalystes parmi les professions pouvant bénéficier de dispenses partielles pour cette formation en psychopathologie clinique : or le titre de psychanalyste ne fait pas partie des titres ou qualités protégés.
On remarque que les textes français visent l’usage du titre de psychothérapeute et non la pratique de la psychothérapie, alors qu’au Québec une loi du 18 juin 2009 soumet l’exercice de toute activité de soin psychique à l’obtention préalable d’un permis délivré par l’Ordre des psychologues (un tel ordre n’existe bien évidemment pas en France). Cette formule rend possibles au Québec des poursuites pénales non seulement pour usurpation du titre de psychothérapeute, mais aussi pour exercice illégal de la psychothérapie.
En dépit du progrès que constitue la réglementation du titre de psychothérapeute, celle-ci laisse entier le problème lié à l’intervention, sans contrevenir à la loi, de « psychotechniciens », « psychoconseillers », « psychospécialistes » ou, tout simplement, « coachs ».
Afin de compléter les dispositions existantes la commission d’enquête souhaite que les ARS puissent interdire l’usage du titre de psychothérapeute aux praticiens qui ne respectent pas les obligations légales. Cette disposition serait un moyen de pallier à l’absence d’ordre professionnel auquel les praticiens semblent se refuser. "


7° NEANMOINS, en ce qui concerne les activités psychothérapeutiques, le rapport préconise " 11 propositions pour mieux connaître et encadrer le recours aux pratiques non conventionnelles, contrôler l'activité des psychothérapeutes, renforcer l'accompagnement des patients et rendre plus rigoureuse l'évaluation des pratiques non conventionnelles " :

21. Mettre en place à l’hôpital des groupes de détection des patients susceptibles d’être victimes de dérives sectaires ou d’abandonner leurs soins en s’inspirant des actions mises en oeuvre à l’égard de victimes de violence.

22. Mettre en place une accréditation par la Haute Autorité de santé des praticiens exerçant des thérapies non conventionnelles à l’hôpital.

23. Rendre obligatoire la déclaration à l’agence régionale de santé (ARS), pour les professionnels de santé, de leurs pratiques non conventionnelles et mettre en place un suivi de ces pratiques par les ordres compétents.

24. Mieux encadrer l’activité des psychothérapeutes en permettant aux ARS :
- de suspendre immédiatement leur droit d’exercice dans un souci d’ordre public (cette possibilité, qui résulte de l’article L. 4113-14 du code de la santé publique, n’existe à l’heure actuelle qu’à l’égard des professions médicales : médecins, dentistes, sages-femmes) ;
- de procéder au retrait de leur titre.

25. Subordonner l’introduction de pratiques non conventionnelles à l’hôpital à un avis favorable de la commission médicale d’établissement et soumettre cet avis à une majorité renforcée.
L’introduction de pratiques non conventionnelles à l’hôpital doit être conforme aux données acquises de la science telles qu’elles résultent des travaux des universitaires et de l’expérience des praticiens. Elle doit faire l’objet d’une expérimentation encadrée, de durée limitée, et d’une évaluation par la Haute Autorité de santé. L’agence régionale de santé doit en être informée.

26. Mettre en place un suivi statistique du recours de la population aux pratiques non conventionnelles pour asseoir sur des bases solides la connaissance du recours à ces pratiques.
Ce suivi pourrait être confié à la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) du ministère de la santé.

27. Intégrer la prise en compte du bien-être du patient aux protocoles de soins, selon des modalités précises, et aux objectifs des personnels administratifs ainsi qu’à l’enseignement universitaire, afin de lutter contre le sentiment de « déshumanisation des soins ».

28. Intégrer un suivi des pratiques libérales des intervenants pratiquant des techniques non conventionnelles à l’hôpital par l’intermédiaire d’entretiens avec les patients, sous le contrôle du médecin chef de service ou du chef de pôle.

29. Afin de limiter toute possibilité d’emprise ou de dérive pendant la période de particulière fragilité qui suit un diagnostic de cancer, prévoir l’accompagnement de la personne dès l’annonce de la maladie et jusqu’à la mise en place du protocole de soins et veiller à transmettre à tout patient suivi pour un traitement de longue durée une plaquette d’information sur les risques de dérives sectaires.

30. Intégrer au contrôle des protocoles de recherche par les comités de protection des personnes créés sur le fondement de la loi Huriet-Sérusclat de 1988 celui des fondements scientifiques des pratiques dont on cherche à mesurer l’effet.

31. Mieux articuler démarche clinique et démarche expérimentale afin de ne pas exposer les patients à des techniques élaborées en dehors de tout cadre sanitaire. La démarche consistant à évaluer les pratiques telles qu’elles sont enseignées par des organismes sans liens avec les institutions sanitaires est potentiellement dangereuse pour les patients.
L’analyse des caractéristiques de ces techniques doit donc amener à privilégier une expérimentation qui, en reprenant leurs aspects jugés intéressants, soit intégrée à des prises en charges existantes.
Leur mise en oeuvre directe dans le cadre de protocoles de recherche comporte en effet le danger de conférer d’emblée une notoriété et une crédibilité à ces techniques et peut conduire les patients à y avoir recours en dehors de l’hôpital.

8° De même, le rapport fait état de 6 propositions " pour mieux connaîtrer et encadrer la formation aux pratiques non conventionnelles, coordonner les acteurs de la formation professionnelle et renforcer leur sensibilisation aux risques de dérives ", notamment :

32. Encadrer les organismes de formation privés aux pratiques non conventionnelles en contrôlant l’utilisation abusive de l’intitulé « Université » par certains de ces organismes.

35. Corriger la fiche ROME K 1103 (« développement personnel et bien-être de la personne »), en concertation avec la DGEFP et la Miviludes, pour en extraire certains métiers potentiellement dangereux.

Parmis les personnalités auditionnées, nous notons :
M. Guy Rouquet, président de l’association Psychothérapie Vigilance

LIRE AUSSI LE RAPPORT DE MIVILUDES 2011 2012.
 






1.Posté par calaque elizabeth le 27/06/2017 15:02
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